Les ondes gravitationnelles

Des astrophysiciens américains annoncent avoir observé les traces laissées par les fluctuations gravitationnelles dans la première lumière émise par l’univers. Si elle est confirmée, il s’agit d’une découverte capitale.
Einstein les avaient imaginées il y a un presque un siècle et elles viennent tout juste d’être observées. Ce phénomène qui a si longtemps résisté à l’observation porte le nom intriguant d’ondes gravitationnelles.
Des astrophysiciens américains emmenés par John Kovac du Harvard-Smithsonian Center for Astrophysics auraient détecté la première preuve formelle de l’existence des ces ondes, des fluctuations de l’espace-temps.
De quoi est-il question exactement? Dans la théorie de la relativité générale énoncée par Einstein, la masse des objets déforme l’espace-temps. C’est la raison pour laquelle les corps massifs détournent la lumière. Mais cette déformation n’est pas forcément statique.
Des événements prodigieusement énergétiques, comme la collision de deux trous noirs, sont susceptibles de provoquer des vagues dans ce tissu spatio-temporel, comme le ferait un caillou lancé dans une mare. Ces ondes se propagent de proche en proche dans l’espace, à la manière d’une onde sismique dans la croûte terrestre, mais à la vitesse de la lumière.
Le problème, c’est que ces vagues sont en réalité de minuscules vaguelettes. Elles sont d’ailleurs si ténues que toutes les expériences visant à les observer directement ont échoué. C’est pourquoi une autre piste de détection, indirecte, est envisagée depuis des années : et si les ondes gravitationnelles provoquées par l’événement le plus énergétique que nous connaissons, le Big Bang, avait laissé des traces?
Alan Guth avait raison. C’est ce théoricien qui a proposé qu’à l’aube de l’Univers actuel et observable, une fraction de seconde (vers 10-30 seconde) après le Big Bang, une courte mais gigantesque phase d’inflation s’est déroulée. La taille de l’Univers croît alors énormément. Durant cette phase, des ondes gravitationnelles ont été émises. En langage de cosmologiste cela s’appelle, me dit Alain Blanchard (Toulouse) « des fluctuations de la métrique ». En langage moins hermétique, on pourrait nommer cela des tremblements de l’Espace-temps.
Ces tremblements génèrent des ondes dans l’Espace, analogues à celles provoquées par un pavé tombant dans une mare. Du coup, la matière –ordinaire et noire, dont la nature est encore inconnue mais qui serait cinq fois plus abondante que la matière ordinaire– est agitée par deux types de mouvements dans cet univers primordial. Ceux provoqués par sa propre attraction sur elle-même, ce qui l’attire vers les régions de l’espace où des surdensités ont été générées par les fluctuations initiales. Mais aussi ceux qui proviennent du mouvement de l’espace-temps lui même, un peu comme une feuille flottant à la surface de la mare est agitée par le passage de l’onde.
Le Figaro sciences 17/03/2014, Libération 17/03/2014

L’observatoire BICEP-2 est situé au pôle sud


Une image de synthèse extraite de la représentation d’une collision de deux naines blanches.
On a représenté ici les ondes gravitationnelles faisant osciller le tissu de l’espace-temps comme des vagues sur l’eau, juste avant la collision des deux astres compacts.
En emportant de l’énergie, ces ondes font décroître la taille de l’orbite d’un système binaire constitué d’astres compacts jusqu’à ce qu’une collision se produise.

© GSFC/D. Berry


Vue d’artiste des ondes gravitationnelles se propageant dans le tissu de l’espace-temps
et rayonnées par un couple de trous noirs spiralant l’un vers l’autre en perdant de l’énergie à la suite de l’émission de ces ondes.
Celles-ci sont en mesure de déformer des étoiles et des planètes en les faisant vibrer.
© Kip Thorne (Caltech), Timothy Carnahan (Nasa GSFC)Futura science

  • mars2014.